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À partir de 2026, les entreprises européennes vont devoir revoir en profondeur leur politique de rémunération. Une directive européenne, adoptée en 2023, imposera plus de transparence sur les salaires, de l’offre d’emploi jusqu’au dialogue en interne.

Cette réforme n’est pas qu’un cadre légal supplémentaire : c’est un tournant culturel. Elle reflète des attentes fortes des salariés et des candidats, dans un contexte où la rémunération devient un sujet central de confiance, d’attractivité et de justice sociale.

Pourquoi maintenant ? Quelques chiffres clés

Les données parlent d’elles-mêmes :

  • En France, les femmes gagnent en moyenne 15,4 % de moins que les hommes, à poste équivalent (INSEE, 2023).
  • 1 salarié sur 2 estime ne pas avoir de vision claire de la grille de rémunération dans son entreprise (baromètre Apec, 2024).
  • 68 % des candidats jugent qu’un employeur qui ne communique pas de fourchette salariale en offre d’emploi est « peu fiable » (Étude HelloWork, 2023).
  • Selon Glassdoor, le manque de transparence salariale est l’un des trois premiers motifs de perte de confiance envers l’employeur, devant les conditions de travail ou la charge.

La pression est donc double : réglementaire d’un côté, sociétale de l’autre. Et ce sont les RH qui sont en première ligne.

Trois évolutions concrètes à anticiper

1. Affichage obligatoire des salaires dans les offres d’emploi

Dès 2026, toutes les entreprises devront indiquer une fourchette de rémunération dans leurs annonces d’emploi, quel que soit le type de contrat (CDI, CDD, alternance, stage).

Aujourd’hui encore, près de 70 % des offres d’emploi en France n’affichent aucun niveau de salaire (source : Indeed, 2023). Cette pratique devra disparaître.

Pour les RH, cela implique :

  • Une formalisation des niveaux de rémunération pour chaque fonction ;
  • Une vigilance dans la cohérence des annonces sur l’ensemble des canaux (site carrière, jobboards, cabinets de recrutement, etc.).

2. Droit à l’information pour les salarié·es

Tout salarié pourra demander :

  • Sa position dans la grille salariale,
  • La moyenne des rémunérations des postes équivalents, déclinée par sexe.

Concrètement :

Une chef de projet pourra demander si elle est rémunérée dans la moyenne de ses pairs, et obtenir des éléments de réponse chiffrés.

Les RH devront donc :

  • Avoir des données fiables et à jour,
  • Pouvoir justifier les écarts de salaire par des critères objectifs (ancienneté, périmètre, performance…),
  • Accompagner les managers dans la gestion de ces demandes, parfois sensibles.

3. Publication d’un rapport sur les écarts de rémunération

À partir de juin 2026, les entreprises de plus de 100 salarié·es devront publier un rapport annuel sur les écarts de rémunération femmes-hommes.

  • Si un écart supérieur à 5 % est constaté sans justification, un plan d’action correctif sera exigé.
  • Des sanctions financières sont prévues en cas de non-respect des obligations (à définir par chaque État membre).

En France, 8 entreprises sur 10 ne publient pas d’analyse complète de leurs écarts de rémunération en dehors de l’index égalité professionnelle. Ce nouveau rapport changera la donne.

Ce que ça implique pour les RH : plus qu’une mise en conformité

Il ne s’agit pas seulement de répondre à une nouvelle exigence administrative.
Ce que la directive impose en surface — données, rapports, seuils — suppose en réalité de revoir la manière dont l’entreprise pense, explique et distribue la rémunération.

Ce qu’il faudra mettre en place :

  • Des grilles de salaires claires, à jour, partagées au moins en interne.
  • Des critères d’évolution transparents, alignés avec les parcours réels.
  • Un dialogue RH–managers plus fluide sur les règles du jeu.
  • Une capacité à répondre aux demandes des salarié·es sans créer de tensions.

Ce que cela peut apporter :

  • Une plus grande attractivité auprès des profils pénuriques ou juniors, sensibles à la clarté.
  • Une réduction du turnover, notamment en début de parcours.
  • Une meilleure cohésion, en évitant les perceptions d’injustice.

Un gain de crédibilité RH, en incarnant une politique salariale assumée.

Par où commencer ?

Voici 4 premières étapes concrètes pour préparer 2026 :

  1. Cartographier vos pratiques actuelles : niveaux de salaire par poste, par service, par ancienneté.
  2. Identifier les écarts significatifs et les causes associées.
  3. Mettre à jour ou créer vos grilles salariales avec des fourchettes claires.
  4. Former vos équipes RH et vos managers à répondre aux demandes d’information et à parler de rémunération avec objectivité.

En conclusion

La transparence salariale ne viendra pas bouleverser en un jour les équilibres internes. Mais elle invite les entreprises à se poser les bonnes questions, à faire preuve de cohérence, et à construire un cadre plus explicite pour chacun.

Pour les RH, c’est un enjeu de conformité, certes. Mais c’est aussi une formidable opportunité d’alignement entre les valeurs affichées et les pratiques réelles.